Bienvenue sur mon blog

Petite promenade singulière dans mon univers.
Je vous invite à partager mes amis les livres, la peinture, le dessin, la musique.
Mais aussi tous les moments de la vie.

Rechercher dans ce blog

mardi 14 décembre 2010

Jeux de mots.



Un gant fin, un lent frein, il enfreint, il était enfin grand, ou fringant, non, long et fin, c’était un lent. On l’appelait le beau cas, le cas fait, un cas bas, disons,  un cas d’astre, sans phare, une sorte de secret air, qui est ourdi, ouï, un vrai rare chant d’âge. Avec
ses oui dits et ses si ternes, il traînait ses six lances d’expert en jeux vains , et les dardait vers les autos mates. Dix gueux et vingt hères  tancèrent ce furieux des astres. Pourquoi vos six fers ? On vous a vu jeter la vieille harde au sol, sans dessein, ni motif, quelles sont donc vos raisons ?
-Je goûtais odes et lais,  en connaissant trois quatre,  quand un cri tard trillé ou plutôt des cris tôts exaltés de bru fade fracassèrent mon ouïe et les tempes, or elles, et les bords pourtant durs de la feuille, me firent un temps pantois. Pourquoi un cri miné, dis-je à cette esthète entêtante, ces cris crissent, ils hissent le ton haut et m’embêtent !
On dit que son père sage était un père sifleur qui hantait tant les gens qu’on tarit son bagou et qu’on le mit au banc.

vendredi 14 mai 2010

L'hérésie de l'ordre.

Faut-il vraiment mettre de l'ordre partout?
Depuis la plus tendre enfance, on nous apprend à classer, trier, plier, ranger. Il faut mettre de l'ordre dans la chambre,  dans le cartable, dans les cahiers, dans la tête. Les pouvoirs politiques créent des lois, les institutions mettent en place un système d'encadrement,  édictent des règles et veillent à leur acquisition. On peut penser que le défaut d'obéissance à ce cadre peut mener vers des débordement de personnes, voire de foules. Les rois l'avaient bien compris, qui condamnaient à la peine de mort toute désobéissance et confondaient la religion et le pouvoir en la même personne. Ainsi déplaire à Dieu, c'était déplaire au Roi. L'hérésie absolue. Depuis la naissance du monde, les chefs de tribu, les chefs de gouvernement n'ont pas dérogé de cette règle: pour que les membres de chaque société puissent vivre en bonne communauté, il faut établir des limites et créer des sanctions.
 Si l'on postule que l'ordre est nécessaire pour que la vie en société soit possible, on admet que l'établissement de règles de vie , de lois, et de  morale est nécessaire et implique que chaque individu observe ces règles et obéisse aux lois.  Seulement chaque individu a une définition de l' ordre qui lui est propre et se soumet plus ou moins difficilement aux règles imposées. Dès qu'on oppose   à  une envie  une limite, le seuil est perçu comme une gêne et déclenche une frustration qui peut entraîner des paroles ou des actes violents. Pourquoi certains s'adaptent-ils aussi facilement au cadre qu'on leur impose, et pourquoi d'autres ne supportent-ils pas d'être empêchés? N'ont-ils pas été à la même "école de la vie"?
Les études des sociologues depuis le début du siècle montrent comment la conformité au groupe social auquel on appartient est nécessaire pour y être accepté. Ce groupe social est le référent, il implique, pour se fondre dans le groupe, obéissance et respect des traditions, respect de la hiérarchie, protection et éducation  des  jeunes afin de prolonger cet état de partage. Deux groupes sociaux dont la norme de vie sociale est éloignée ne peuvent donc se comprendre. On peut imaginer ce qu'une foule contient de diversités de groupes sociaux et combien l'affrontement verbal, puis physique s'impose . L'incompréhension est totale et les représentations qu'ont les groupes les uns des autres peuvent justifier la violence qui accompagne leur rencontre.
N'ont-ils pas appris les mêmes règles? Si, mais ils s' approprient les règles en fonction de leur environnement proche et du bain culturel qui les accompagnent depuis la naissance. Ici, la règle est primordiale, elle constitue la base de l'éducation. Mettre de l''ordre, c'est s'organiser pour être efficace et réussir. L'acquisition de compétences est elle même planifiée et subordonnée à l'ordre et aux méthodes, et  répond aux aspirations élevées de la famille. Dans ce moule social structuré , le respect aux règles est une évidence, c'est une des clés de la réussite. Sous-jaçent à ce modèle, on peut imaginer combien la distance est grande entre l'ici et l'ailleurs des couches sociales, quand, pour  ce dernier, l'absence de cadre fragilise l'acquisition de compétences et les rend inefficaces.
Ailleurs, les aspirations sont tronquées depuis l'enfance. Le modèle familial est pesant . Il faut fournir un travail énorme pour se départir des règles du groupe, ou de la carence des règles.
L'ordre? quel ordre? Pourquoi ne pas choisir la liberté?
Les médias citent des cas de réussite de personnes qui n'ont pas bénéficié des règles et du statut de l'ici. Ils doivent leur réussite à des motivations intrinsèques: sortir de la misère, et à des motivations extrinsèques associées à la notion de richesse et de pouvoir. Généralement, ces réussites sont peu nombreuses, et forcent l'admiration. On découvre souvent que le groupe social et culturel auquel appartenait ces personnes était démuni des ressources essentielles et ne permettait pas l'accès à la connaissance. Est-il temps de changer de moule, et est-ce nécessaire?
La liberté, la bohème, l'errance,  le je-m'en-foutisme, sont parfois l'apanage d'individus qui sont issus du cadre de l'ici et qui partent ailleurs exercer leur crise, ou pousser plus loin leur désir de connaissance d'un monde qui leur est étranger, et auquel ils aspirent appartenir l'espace d'un bout de vie.
Pour ceux-là, le non respect des règles est transitoire et le retour au sein de groupe sans trop de conséquences. Le même individu issu de l'ailleurs, aura peu de chance de se promouvoir dans la couche de l'ici et la réintégration dans le moule familial sera vécu comme une dégradation de son pouvoir, une destitution douloureuse.
Ne peut--on désobéir qu'un peu? Peut-on jouer le double jeu, c'est à dire avoir l'air de se couler dans le moule et faire ce que l'on veut? Il faudrait débattre sur ce sujet et apporter la preuve que ne respecter l'ordre qu'en façade est possible. Cela voudrait dire qu'entre la connaissance des règles et leur application, il existe un espace tangible, qui permet de jouir d'un sentiment de liberté formidable: celui de  tout remettre en ordre avant la sanction, celui de garder le pouvoir malgré les règles.



 

dimanche 9 mai 2010

Senteurs extrêmes 2ème épisode.


Sur la page cartonnée d’un cahier vierge,  il inscrivit son nom, puis, sur la page de garde, le  jour et l’heure : dix mai deux mille sept, huit heure trente. Enfin, il établit un répertoire, où, fleurs, fruits, aromates, constituaient la matière première. Il fabriqua ensuite un catalogue où chacune des rubriques  comportait une échelle graduée de un à dix. Enfin, il nota les sensations qu’il venait d’éprouver au lever du lit, juste après avoir fermé la baie vitrée. Mathis resta assis devant le cahier ouvert jusqu’à l’arrivée de sa mère vers midi. Il se leva avec plaisir et fit entrer dans la petite maison, la seule femme qu’il aimait.
Le samedi, comme le dimanche, étaient des jours sans fard et sans parfum. Cele ravit Mathis qui se laissait câliner par cette mère sevrée de tendresse et d’élan masculin. Cette femme, mettait un point d’honneur à changer un détail de sa toilette chaque fois qu’elle venait. Mais il n’était pas dupe, le petit tailleur gris était usé jusqu’à la trame. Il la félicitait cependant sur sa toilette et faisait mine de découvrir chaque fois sa tenue. En vérité, Mathis souffrait de ne pas gagner suffisamment pour offrir à sa mère plus de confort.
Pourquoi avait-il accepté ce nouvel emploi ? Il courait les petits boulots pour éviter à sa mère de se priver davantage. Il avait trouvé un travail intérimaire de janvier à avril dans une petite sociéte de déménagement. Il avait pu respirer à loisir les murs, les meubles, les gens. Il regretta soudain de ne pas avoir pris de notes à ce moment là. Aujourd’hui, son répertoire serait riche et chargé  d’impressions.
Ce travail lui plaisait, car il voyageait dans l’univers d’autrui et profitait de sa situation de subalterne pour rester anonyme . Il se présentait au nom de la société, de façon à ne jamais décliner son identité. Dans l’équipe, les hommes s’appelaient par leur prénom et ne posaient  pas de question . On lui avait demandé de s’inscrire en salle de musculation pour éviter les accidents  et être efficace. C’est comme cela qu’il rencontra Jérémie Tandieu , un adepte du body building. Celui-ci l’avait pris en main de manière amicale. Les deux nouveaux amis se rencontraient ponctuellement en salle le soir après le travail. Aujourd’hui, bien qu’il ait changé de boulot, Mathis continuait son entraînement musculaire et acceptait  de voir son ami au café de la poste. Cette déclaration amicale le touchait. Il avait pris le pli de vivre seul dans sa petite maison située à la campagne. Les conversations avec lui-même le dérangeaient bien moins que les contacts qu’il était forcé d’avoir à l’extérieur. Il n’avait jamais invité Jérémie chez lui, et avait même déclaré habiter chez sa mère pour éviter toute invasion même fortuite.
Pourquoi souffrait-il autant du contact avec le monde ?

thais, massenet

Sony Ericsson - Home

Sony Ericsson - Home

samedi 8 mai 2010

Humeur douce

Il faut mettre l'amour en un lieu minuscule.

Mais pourquoi vous cacher, me dira-t-on? De quoi avez vous peur. L'amour au grand jour, quoi de plus magnifique, puisqu'il ose s'exposer, puisqu'il s'affiche, il ne craint rien.
-Ce n'est pas ce que j'ai dit. Je crois que le monde est brutal. Il absorbe la foule, les hordes de gens, il écrase l'univers singulier, il efface la personne. Il cherche à récupérer par force les incrédules, les résistants, les tendres aussi pour les pousser dans son giron. Le seul refuge à la puissance et la mainmise du monde, c'est la retraite. Un lieu tout petit. La tête, l'esprit, la pensée, l'intime, voilà le minuscule. La trahison du groupe permet à l'insu des autres de se retrouver, soi, ceux que l'on aime.
-Mais qui vous interdit de penser? de rêver?
-Personne, justement, parce-que je m'extraie de la foule. La musique de la vie ne me traverse pas.
je caresse des yeux le monde alentour, les autres, ils me sont nécessaires, ils sont vivants.
-Vous n'aimez pas les gens, vous les ignorez.
-J'aime les autres dans leur petit minuscule, j'expose le nécessaire de ma pensée et attends l'indispensable respect.
-Les gens n'aiment pas jouer aux devinettes, ne croyez vous pas au contraire qu'il est nécessaire de vous livrer davantage ou de donner des clés d'accès pour vous faire comprendre?
-L'amour des autres n'est pas spontané, il faut du temps beaucoup de patience, des marques de confiance, il faut des années. Je pense qu'il faut savoir se mettre en jachère, pour cultiver un jour l'amitié et l'amour, les sentiments vrais.

mercredi 5 mai 2010

Etourderies.

Un platane et aussi un palmier, dites vous?
Mais oui, la montagne se pare de plumes vertes, les masses végétales se touchent, se pénètrent et se consument sous le soleil blanc des hauts. On voudrait se cacher , se tapir sous la mousse, respirer les fougères, les crosses, la lumière, la pluie et la rosée, se soustraire à la vie. L'espace d'un moment les branches de platane se bercent et se balancent, sans perdre la droiture du tronc qui les maintient. mais où sommes nous donc?
A La Plaine des Palmistes, à l'ïle de La Réunion.
Et les palmiers?
Il suffit de descendre plus bas vers la mer, et très vite la horde des palmiers surgit. Ils boivent l'eau des sources, se mêlent aux arômes , aux fleurs exubérantes. Ils happent avec avidité les senteurs étrangères, s'indignent et se relèvent pour chercher le soleil et rêver aux platanes aux racines prospères, au bleu des hortensias qui bordent les fossés, à la vie majestueuse des géants de la terre.
N' y-a-t-il pas de compromis?
Il faut faire confiance aux vents, à la force de la lumière et du temps qu'il faut pour rejoindre la mer. La nature refuse les compromis. Comme si la terre pourtant goulue de racines diverses refusait d'accueillir les plantes exotiques. Elle tisse, trame des barrières sensibles. La proximité, oui, pas la promiscuité. La nature se charge d'éliminer les passe-droit, elle s'acharne à détruire les intrus. Elle choisit.
C'est sa politique à elle. Elle crée et recrée et elle tue.
Je souris en pensant aux poteaux téléphoniques chargés de lianes parasites, là et ailleurs, elles trouvent des tuteurs. Aucune permission n'est requise, et la terre sourit largement à ces traine misère qui s'accrochent à la vie et lèchent le bois comme le béton.

1 jour 1 actu - Le site d'info des 7/13 ans — 1 jour 1 actu - Le site d'info des 7/13 ans

1 jour 1 actu - Le site d'info des 7/13 ans

1 jour 1 actu - Le site d'info des 7/13 ans

samedi 24 avril 2010

Les phrases barbares.

Sans queue ni tête? peut-être.
Je trouve intéressant, la manipulation des mots dont la cohabitation dérange l'esprit et tord la bouche qui les prononce.
exemple:

Holà Lola,les gros gras bras blancs d’Allah donnent l’hallali là-bas et les draps plats planent au-delà d’Aboiliga.

Vois-tu les gros-grains blancs drus brosser l’adroit Landru à l’endroit où le bras droit tue.

Si Simone scie sans cesse, la somme des sons sonne, le si et le sol sonnent et résonnent en somme.

...C'est tout pour aujourd'hui.

vendredi 23 avril 2010

cartes à textes.


Le jeu comporte 52 cartes, dont deux jokers. Nombre de joueurs: 4 à 6.
Il s'agit de distribuer des cartes également à chacun des joueurs.
Chacun doit essayer de reconstituer une famille de trèfle, carreau, cœur, pique par tirages successifs dans les jeux adverses.
Ce jeu resterait simple si les perdants ne devaient restituer, carte au choix retournée sur table, le texte figurant dessus.
Autrement dit il s'agit d'exercer sa mémoire.

mercredi 10 février 2010

Cyrano créole

"Je marche sans rien sur moi qui ne reluise,
Empanaché d’indépendance et de franchise."

Moi l’ai prope sur moin.quand même le zabit lé pas neuf,
mais la morale lé bon, mon l’esprit lé pas tord .
quand moi l’a raison, là, mi préfère bataille un bon coup ec le bougre plutôt que mi ferme mon bec.
Mi gagne bien dormir à cause que n’a point rien y râle ma conscience la nuite .
mon camarade y connaît que mon l’esprit l’est droit
et que n’a point rien y brille sur moin pour fait croire que moi l’ai riche.
Moin l’est franc,aussi, mi dis a zot toute ce que mi pense ,
Et puis moin lé fier , et mi préfère un bon râler pousser
que zot espèce rond de jambe , ça l’a pas des manières.

L'humour sain

J'aurais pu dire: l'humour salvateur.
Quand l'esprit divague et balance des mots impossibles, des phrases qui n'ont de sens que pour celui qui les prononce. Cela devient de l'humour intimiste, une provision de rire intérieur qui revigore l'esprit et donne goût à la vie. La vie n'est pas si terrible, dans le fond. Doit-on croire que seuls les gens cultivés sont capables d'associer et de distordre des mots pour se comprendre? Pas du tout, on voit bien que des générations entières ont passé leur temps à fabriquer des mots pour se reconnaître. Je ne parle ici que du vocabulaire, pas des attributs vestimentaires ou autres agréments barbares. non, il s'agit pour beaucoup, même parfois, au sein d'une seule famille de déranger le sens usuel des mots et d'en donner une signification fermée aux systèmes de représentation extérieures . Alors seulement commence le rituel où chaque message est décrypté par l'ensemble sans condition . L'avantage du petit nombre augmente le plaisir des mots et chaque membre de la tribu peut ainsi déguiser sa phrase à l'extrême. Mais quel dépaysement, lorsque le groupe s'ouvre au monde extérieur!
Récemment j'ai été amenée à connaître une famille à l'humour salvateur. J'ai été initiée à l'humour créateur, celui du déguisement des mots ou des embellies fantastiques ,majestueuses, folles phrases superbes, que chacun goûtait à l'envie.
Peut-on être un puriste de la langue et accepter cette supercherie langagière? N'y a-a-t-il pas lieu de trembler qu'un des siens oublie la langue originale?
Et pourtant, j'ai connu des dialogues bizarres où chaque mot révélait les années de connivence dans des lieux sacrés. Quiconque écoutait un discours passait une frontière et pénétrait le monde difficile des initiés. Le voyage pouvait commencer.

mercredi 27 janvier 2010

le feuilleton Senteurs Extrêmes.

Drôle de type, ce Mathis. C'est un gars comme tout le monde, il ne roule pas sur l'or et les emplois qu'il trouve le confortent dans la solitude. Son amitié pour jérémie Tandieu va tout changer. Tout?
Pas vraiment. Mathis voue un amour et une admiration sincères pour sa mère, Pierette Beaujeu. Elle descend sans doute, d'une haute lignée.
Est-ce l'amour de l'histoire, que lui a transmis sa mère, qui va le pousser à "descendre" dans les siècles passés comme ils le faisaient ensemble autrefois?
Est-ce simplement sa passion secrète ou sa quête de lui-même qui va lui faire se créer des racines imaginaires?
Et si sa mère était vraiment une princesse?
Incapable de se raconter, car elle perd la mémoire, Pierrette Beaujeu perd l'histoire de sa vie, elle a tout oublié de son passé.
Alors, Mathis, avec amour et déraison, va lui retracer le fil de sa vie.
Jérémie va vivre l'histoire de Mathis comme on lit un livre, lentement, avec émotion. Pour la première fois,depuis l'enfance, il s'attarde dans une relation amicale.
Jérémie a-t-il le recul nécessaire pour démêler le vrai et le fantasque? Sera-t-il assez fort pour tendre la main à son ami avant qu'il ne perde la raison?

lundi 4 janvier 2010

Senteurs extrêmes

Petite suite d'un feuilleton inédit signé GALANE. 2009.

Senteurs Extrêmes.

Mathis respira profondément. L’air qui venait du dehors entrait par la baie vitrée de sa chambre. La brise ne ramenait aucune odeur reconnaissable. L’air venait, mais ne s’imposait pas, il frôlait le store et le soulevait par intervalles réguliers, il faisait tournoyer les papiers sur le chevet, mais il restait vague, pas même chargé du parfum des fleurs qui se balançaient contre la terrasse.
Un autre que lui eut trouvé l’air doux et agréable et se fut prélassé dans le lit par plaisir. Mathis chercha un qualificatif à cet air qui pénétrait la pièce, il inspira avec force l’odeur de la chambre et se résigna à fermer la vitre. Il tira sur l’encolure de son sous-vêtement et s’enfouit presque le visage à l’intérieur. Il prit une grande bouffée de l’air emprisonné dans le linge, et mesura son plaisir . Ce geste le ranima. Il jouit de cet instant comme un privilège, comme une femme à qui on donne des sels après un évanouissement.
Ce n’est pas la première fois qu’il remarquait la fadeur de l’air venant du dehors. Il ne trouvait pas d’autre moyen pour y remédier que de se réfugier dans ses vêtements, et de les humer comme un chien de chasse renifle l’odeur du gibier. La moindre sueur émanait lentement de son corps, remontait imperceptiblement pour se fixer enfin dans ses narines. Son esprit se dopait au contact de ce souffle et faisait jaillir des idées presque poétiques. Il se demanda comment il bâptiserait l’odeur de son corps et se promit de nommer à intervalles réguliers les variations qu’il ne manquerait pas de percevoir au cours de la journée.
Lorsqu’il était enfant, Mathis souffrait du parfum des autres comme une invasion insupportable. Il abrégeait les contacts, retenait sa respiration et sortait à l’air libre, happait l’air neutre qui pouvait effacer cette surabondance de sucs. Sa mère, qui ne supportait pas l’odeur des autres, s’inondait avec une eau de toilette aux senteurs profondes et poivrées, qui retenaient toute l’attention des visiteurs et étaient sensées masquer les effluves étrangères à son corps. Il décida que cette phobie olfactive lui venait directement de sa mère. Cette pensée le rassura et l’encouragea dans sa démarche de qualificatifs qu’il faisait sur lui même. Il arrachat une feuille vierge de son carnet de rendez-vous, et nota sérieusement son nom : Mathis Beaujeu. Pour être efficace, cette fiche de renseignements devait contenir,outre son âge ou sa raison sociale, des éléments stables sur son mode de vie, comme ses rencontres masculines et féminines ou même ses habitudes alimentaires. Chaque geste de sa vie, noté fidèlement, constituerait un panel fidèle de ses propres odeurs.
Il ouvrit le dictionnaire de synonymes à la page du mot odeur. Il fut déçu. Il ne se reconnut pas dans les distinctions nombreuses et variées. L’inventaire personnel qu’il souhaitait établir se heurtait à des termes presque malsains. Il trouva dans le livre peu de secours et convaint qu’il devrait se charger des définitions. Les descriptions seraient complétées du plaisir à respirer son corps à tel ou tel moment de la journée. Les inspirations brèves ou fugasses, ne lui permettraient pas d’emprisonner l’instant. Il fallait donc imaginer un livre comptable sérieux et exhaustif . Mathis se sentit heureux de la décision qu’il venait de prendre. Il ne savait pas encore combien ce simple geste allait modifier ses rapports au monde au point de se rendre haîssable.


Une nappe d’air tiède et douce remplissait l’appartement qui permettait à Mathis d’apprécier le calme et la solitude. La pâleur du matin donnait à la cuisine une allure hivernale, grise et froide . C’était un jour sans soleil, animé juste de quelques lueurs blanchâtres projetant sur les murs des ombres pâlotes. Il n’alluma pas les lampes, et vint s’asseoir devant la petite table de bois clair pour y prendre son déjeuner. Il se versa un grand bol de café noir dont le fumet n’évoquait aucun plaisir. Il apprécia l’amertume et se rendit compte qu’il ne sucrait jamais ses aliments. L’odeur du sucre le dérangeait jusqu’à l’écœurement et lui faisait songer, que chaque fois qu’il était exposé à en sentir l’arôme, une étrange sensation se produisait en lui. Il s’imaginait dans un bain de mélasse. Une colle caramélisée engluait ses doigts et s’infiltrait sournoisement sous la peau. C’était un calvaire.
Déjà, enfant, il s’ingéniait à éviter les amies que sa mère recevait le premier mercredi de chaque mois. Il profitait de ce que la crasse de ses mains et de ses vêtements l’obligeait à se tenir éloigné du monde pour éviter tout contact nocif. Il soufflait alors des baisers du bout des doigts en guise de bienvenue et agissait de même lorsque les dames s’en allaient. Il était convenu avec sa mère qu’il se laverait après le départ des visiteuses. Le carcan de crasse maintenait au chaud son corps et se mêlait à la sueur avec bonheur. La boue ne lui laissait aucune impression. Non pas qu’il recherchât des odeurs fortes, mais il avait remarqué, à s’être bagarré avec quelques camarades de classe, qu’il était attiré par quelques-uns, quand bien même ils étaient adversaires. Il s’arrangeait pour se tenir « par hasard » à proximité de l’un d’eux, au moment de la remise de copies par le professeur. Il prenait une bouffée de sueur au visage, et fermait les yeux avec délice . Les filles n’avaient pas le privilège des bonnes odeurs, il imagina que leur peau devait être aussi fade que l’air du dehors. Pour ne pas dévoiler son secret auprès des filles, il usait du même stratagème qu’avec les amies de sa mère, et les tenait à distance respectable tout en les flattant. Ainsi, il ne passait pas pour un goujat et pouvait respirer tranquille.
Mathis ferma les yeux et chercha dans sa mémoire les yeux de son père. Il les trouva dans un regard droit, sans ménagement, presque hostile. L’allure dure et roide de son père le plaçait toujours, lui, l’enfant, en état d’infériorité et réclamait inlassablement des comptes qu’il était bien en peine de fournir. Mathis fut un bon élève jusqu’au baccalauréat et songea même à faire des études longues, mais son père était décédé au lendemain de ses seize ans, ce qui lui laissait peu d’espoir d’aller à la faculté. C’est à cette même époque que madame Beaujeu dut faire des ménages . Les amies du mercredi avaient vite disparues, et sa mère ne fut jamais invitée. Les conditions de vie avaient totalement changé.
Mathis ne souffrit pas beaucoup de l’absence de ces femmes, qui jaccassaient toute l’après midi et n’accouchaient jamais d’aucun ouvrage, mais il vit sa mère changer peu à peu. La jeune femme svelte, au goût de poivre s’alourdit au grès des tâches ménagères. Elle ne riait pas souvent, mais accordait une attention véritable et tendre pour son fils et l’encourageait des yeux. Les yeux de son père n’apportaient pas d’amour, il le savait, maintenant qu’il était mort. Il ne souffrait pas de sa disparition. Il avait essayé de se rapprocher de ce père austère et froid et sentait sauvagement cette odeur d’homme de laquelle il espérait secrètement hériter. Mais les contacts étaient brefs et ne dégageaient pas le musc attendu. Il avait pourtant brûlé ses narines contre ses joues barbues et aspiré furtivement l’haleine de tabac brun. Il s’était bizarrement inspiré des attitudes de son père, peut être pour mieux comprendre quels sentiments l’animaient. Même dans les rares moments où ils se trouvaient seuls, son père ne le touchait jamais. Mathis se demanda ce qui avait pu unir ses parents. Il ne les avait jamais vu s’embrasser devant lui. Un matin, pourtant, il avait perçu en embrassant sa mère le mélange des odeurs de ses deux parents. Etait-il donc pestiféré ? ou bien attendait-il de son père des élans insensés qui ne viendraient jamais ? Il regretta de ne pas avoir enfermé dans une boite l’haleine de tabac brun et se demanda s’il arriverait un jour à la reconstituer.
Mathis repoussa le bol vide et se dirigea vers la salle de bain.
Il aimait particulièrement le samedi et se prélassait sans limite de temps. C’est au moment où il ne faisait rien qu’il travaillait le plus. Son esprit divaguait et traquait dans sa mémoire la panoplie d’adjectifs nécessaires au travail de qualification des odeurs. Il donna libre cours à la fantaisie et s’amusa de l’étendue des possibles. Des idées commencèrent à germer dans sa tête, qui ne cesseraient plus de le traquer. Il allait dédier ce descriptif à lui-même, pour son plaisir intime, il allait classer les moments, les heures, le climat, les saisons, ses états d’esprit, mais ne voyait pas encore comment effectuer des prélèvements et les conserver. Comment allait-il prolonger ces moments ?

Qui êtes-vous ?

Ma photo
Je vis dans l'Ile de La Réunion depuis novembre 1970 et je m'y plais. J'ai fait toute ma carrière d'enseignante à La Réunion. J'aime dessiner, peindre, coudre, lire et écrire.

Archives du blog